On met souvent en garde contre les régimes trop riches en matière azotée - et en particulier contre l'excès de protéines animales - sous prétexte que les reins pourraient en pâtir. Cette thèse manque cependant de fondement scientifique, car elle s'appuie uniquement sur l'expérimentation animale et sur des études portant sur des sujets atteints de pathologies rénales. Quelques-uns de ces travaux, mais de loin pas tous, ont effectivement montré qu'une réduction des apports protéiques retarde la progression de l'insuffisance rénale.
Afin de déterminer de manière systématique l'effet néphropathologique possible d'apports
protéiques abondants chez le sujet bien portant, les données obtenues de la Nurses’ Health Study, une étude d'observation de longue durée portant sur plus de 120 000 infirmières, réalisée aux Etats-Unis, avaient été analysées*. En 1989, la fonction rénale de 1624 participantes avait été évaluée sur la base d'une analyse de la formule sanguine, par la mesure de la clairance de la créatinine et de la vitesse de filtration glomérulaire. Une légère insuffisance rénale avait été décelée chez 489 d'entre elles. Les examens ci-dessus furent alors répétés en l'an 2000. Par ailleurs, le mode d'alimentation des probantes fut recensé plusieurs fois pendant les 11 ans d'observation.
Résultat: Chez les 1135 femmes dont la fonction rénale était intacte au début de l'étude, une
consommation élevée de protéines s'avéra inoffensive pour les reins. Aucun lien ne put d'autre part être établi avec la source des protéines ou le fait qu'elles soient d'origine animale ou végétale. Seules les 489 participantes souffrant au départ de légère insuffisance rénale
manifestèrent une réaction aux protéines: chez celles qui présentaient la consommation en
moyenne la plus élevée (entre 86 et 143 g/jour), le risque de détérioration de la fonction rénale
(d'au moins 15 pour cent) au cours des 11 ans d'observation était significativement plus élevé.
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Chez le sujet bien portant, l'absorption durable de grandes quantités de matière azotée ne porte
apparemment aucun préjudice à la fonction rénale. Des études antérieures avaient déjà montré que le rein s'adapte à long terme à une consommation élevée de protéines par une augmentation de volume et donc de sa capacité. Cette nouvelle étude montre une fois de plus que les données issues d'expériences réalisées sur des animaux ne peuvent en aucun cas être transposées sur l'être humain, parce que les doses appliquées sont souvent extrêmement élevées et que les conditions d'expérimentation ne sont pas assez proches de la réalité. Il faut se garder par ailleurs d'appliquer au sujet bien portant des constats valables pour des pathologies spécifiques, "à titre préventif".
*Knight EL, Stampfer MJ, Hankinson SE, Spiegelman D, Curhan GC. The impact of protein intake on renal function decline in women with normal renal function or mild renal insufficiency. Ann Intern Med
2003;138:460-7.
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